Perfectionnisme

  • Bribes sur le perfectionnisme : les 3 types, et les règles qui les sous-tendent.

    • Le 17/05/2022

    Les 3 types de perfectionnisme

    Hewitt et Flett définissent le perfectionnisme comme « un style de personnalité qui serait associé à un grand nombre de difficultés éprouvés tant sur le plan psychologique que dans les relations interpersonnelles ou dans le rapport au succès ».

    Ces auteurs distinguent trois sortes :

    • Le perfectionnisme orienté vers soi : celui-ci décrit la motivation personnelle à se fixer des standards de réussite élevés, voire inatteignables. Il est négativement lié au manque de confiance en ses aptitudes à réussir.
    • Le perfectionnisme orienté vers autrui : il signifie que l’individu a des attentes très élevées envers son entourage. Il affirme sa position de leader. Il mesure souvent mal les conséquences relationnelles d’une telle manifestation de supériorité.
    • Le perfectionnisme socialement prescrit : il intervient lorsqu’une personne a l’impression qu’on lui fixe des standards de performance très élevés (parent, professeur, …). On établit alors une équivalence entre être valorisé et être parfait. Celui-ci peut se manifester à travers du choix des études et du métier, des loisirs, du choix vestimentaires, etc.

    Ces auteurs ont développé un test : « Children and adolescent perfectionist scale », il évalue deux dimensions du perfectionnisme : le perfectionnisme centré sur soi et le perfectionnisme social.

    Les règles qui sous-tendent le plus souvent le perfectionnisme:

    Les mêmes scénarii sont rejoués inconsciemment et reposent sur trois règles. Elles forment une boucle : on vise la perfection dans l’idée de s’aimer soi-même (perfectionnisme de valorisation). Ensuite, on tente de se faire aimer des autres (perfectionnisme d’intégration sociale). Lorsqu’on est aimé, on se sent parfait.

    • Le perfectionnisme de valorisation : la supposition est que pour avoir une certaine valeur, il faut être parfait, celle-ci est fonction des actes. Les personnes doutent d’elles, et en même temps, ce perfectionnisme a un fond narcissique. Cette règle de vie implique d’être en recherche constante de performance et de défis, ce qui épuise, stresse et tout cela pour une insatisfaction permanente.Si cette règle de vie est trop rigide, elle peut à long terme entraîner des troubles de l’estime de soi, des dépressions chroniques, certaines anorexies mentales ou un alcoolisme et surtout le stress ou le burn-out.
    • Le perfectionnisme d’intégration (ou d’acceptation) : la personne qui souffre de ce type de perfectionnisme n’est pas naturelle avec les autres et ne transmet pas ses émotions. Ce que les autres peuvent penser est très important. Elle a peur d’être rejetée et contrôle donc ses paroles. Influencée par cette pensée qu’il faut être parfait pour être acceptée, elle adopte un comportement d’approbation et de perfection dans les relations sociales. Elle ressent de l’angoisse, de l’inquiétude, ne ressent pas de sécurité par rapport à sa place dans un groupe. Cette règle de vie peut à long terme entraîner des comportements de dépendance affective, d’assujetissement à l’autre et augmenter le manque de confiance en soi.
    • Le perfectionnisme de contrôle : il s’agit ici d’être parfait pour faire face aux aléas de la vie. L’imprévu est effrayant et la personne prépare, anticipe les événements. Elle fait beaucoup les choses par elle-même. Elle stresse, a peur de ne pas avoir le temps de tout faire, ou de mal le faire. Elle est dans le contrôle. Les principales complications de cette règle de vie sont représentées par le trouble anxieux généralisé. Les personnes passent beaucoup de temps à organiser, prévoir les choses. Elles sont souvent surmenées.

                       Anne-France Dinant 

  • Bribes sur le perfectionnisme : les mécanismes.

    • Le 17/05/2022

    Le perfectionnisme peut être définit comme un schéma cognitif de base qui organise l’information reçue et s’enracine tôt dans la vie en fonction des expériences vécues. Il peut être perçu comme « une croyance erronée qui peut mener à une mauvaise interprétation de l’environnement par l’individu, à des pensées et des émotions négatives et à un comportement autodéfaitiste de l’individu ». 

    Etre perfectionniste n’est pas un problème en soi. C’est l’excès, la rigidité qui va s’appliquer à tout ce que nous faisons, qui risque de poser problème et au final créer un mal être.

    Certaines distorsions cognitives peuvent être retrouvées dans le perfectionnisme :
    Premièrement, la personne a tendance à minimiser ou ne pas reconnaître les aspects positifs de son comportement. Elle se trouve toujours dans une situation où elle n’a pas obtenu ce qu’elle désirait. Si elle réussit, son succès est alors banalisé et elle n’en tire pas de plaisir. Si elle ne réussit pas, elle est frustrée et s’en demandera encore plus lors de la prochaine expérience.
    Aussi, elle dramatise l'importance que revêtirait une erreur si elle en commettait une, et alors, au lieu de parler d’un travail imparfait, elle parlera d’un travail raté. Cela rejoint sa façon de pensée dichotomique. Tout doit être parfait, sinon c’est le rejet et l’échec.
    Elle a un sens exagéré de l'obligation qui se manifeste dans ses pensées automatiques et ses verbalisations sous la forme d'affirmations telles que « il faut ».
    Enfin, elle a également tendance à généraliser à outrance à partir des erreurs qu'elle fait. Selon elle, si elle fait une erreur à un moment donné, elle en fera forcément toujours.
    Le perfectionniste entre dans un système de dépendance à ses actions et aux autres, il doit travailler tous les jours à être quelqu’un de bien (à ses yeux). Sa confiance en soi est conditionnelle : sa valeur dépend de ce qu’il produit, de la manière dont les autres le voient, de ses réussites, …. Il est nécessaire pour un bien-être, de trouver un équilibre entre la confiance en soi inconditionnelle et la confiance en soi conditionnelle. Et ainsi de pouvoir penser que l’on est un être avec des qualités, mais aussi des défauts. La confiance en soi inconditionnelle a été donnée en général précocement par la famille, c’est elle qui sous-tend l’estime de soi.
    Ces façons d'interpréter les choses mènent à des symptômes d'anxiété.


    Voyons plus précisément comment se manifeste le perfectionnisme au quotidien :


    Au niveau du comportement:


    ✓ L’hyperactivité : être toujours en mouvement, en projet.
    ✓ La pression temporelle : ne pas avoir le temps, être toujours en retard, il reste toujours quelque chose à faire. Mauvaise maîtrise du temps.
    ✓ La procrastination : la gestion du temps et de la quantité de travail par journée est mauvaise. Le travail est donc reporté au lendemain.
    ✓ Le plaisir : le plaisir est inconnu. Les tâches rébarbatives sont faites en premier.
    ✓ L’impatience émotionnelle et relationnelle : impossibilité de rester sans rien faire, cela ferait ressentir un vide et de l’angoisse.
    ✓ L’anticipation permanente : vivre en imaginant les problèmes futurs potentiels.
    ✓ La difficulté à déléguer : ne pas faire confiance à l’autre dans la réalisation d’une tâche. 
    ✓ Le manque de repos : la détente n’est pas au programme.
    ✓ La vérification en détail : l’insécurité est une constante et elle s’accompagne de com-portement qui frôlent la compulsion.
    ✓ Ne prend pas le temps de profiter de la vie, des gains : aussitôt un défi accompli, un autre est déjà en tête.
    ✓ Les règles et les structures : elles manquent de souplesse. Certains possèdent des normes sociales et éthiques très élevées 
    ✓ Des atermoiements: les longues hésitations avant de prendre une décision.
    ✓ L’implication démesurée : il ne sait pas où s’arrêter, quand une tâche est terminée. Il relit, retravaille, perd du temps.


    Au niveau des émotions:


    ✓ L’insatisfaction est le problème principal. Celle-ci se renvoyant vers la personne elle-même : elle n’a pas d’admiration envers elle-même, n’est jamais assez ceci ou cela. (Un 17/20, laisse 3 points qui n’ont pas été obtenus et qui auraient du l’être). Et aussi vers les autres : ils ne font jamais assez bien.
    ✓ Le déficit en plaisir et la compétition : dès qu’une activité devient agréable, une compétition démarre pour être le meilleur dans celle-ci. Les attentes deviennent trop élevées et le stress finit par enlever le plaisir.
    ✓ Le vide : il doit être rempli, il est angoissant. Une nouvelle activité doit commencer .


    Au niveau des pensées:


    ✓ La productivité : la valeur des actes est confondue avec la valeur de la personne. C’est « l’estime de soi conditionnée à la productivité ». Aussi, il lui arrive de sous-entendre des choses qui n’existent pas. Par exemple, « les autres ont une maison en ordre », il se démotive alors et culpabilise si la sienne ne l’est pas. Ainsi, lui, constate son incompétence tous les jours… Une autre personne ne remettrait pas en cause son estime de soi ou sa compétence parce que son chez-soi n’est pas rangé.
    ✓ Le regard de l’autre : si la valeur de la personne dépend de ses actes, elle dépend aussi des autres, de ceux-là même qui jugent les actes. L’opinion de chaque personne est importante. « Rien n’empêche tant d’être naturel, que l’envie de paraître ». Il pense aussi rapidement qu’un autre a vu son erreur donc va le juger, il fait une inférence arbitraire.
    → Le fait de fonctionner dans l’évaluation permanente de ce que pensent les autres, et dans le jugement de sa personne correspond au syndrome de la double performance.
    ✓ L’abandon pour cause d’imperfections : leur place n’est jamais acquise, ils doivent la mériter et travailler sur leurs performances pour se faire accepter par les autres.
    ✓ La focalisation sur les détails : dès qu’il repère une erreur, il ne sait pas en faire abstraction. Ainsi, un détail est extrait d’un ensemble satisfaisant, c’est l’abstraction sélective.
    ✓ Des attentes très élevées : envers eux et envers les autres. Atteindre des objectifs élevés est le moyen de répondre à son besoin de reconnaissance et d’estime. Il a peur de ne plus être aimé s’il n’est pas excellent. Il trouve la récompense dans l’appréciation de l’autre, et non dans celle qu’il peut tirer lui-même de son action.
    ✓ La généralisation : les imperfections sont généralisées : « c’est toujours la même chose ». La personne ne reste pas précise dans son autocritique, elle ne juge pas son erreur présente mais aussi toutes les précédentes en généralisant.
    ✓ La dichotomie : tout ou rien. Soit je suis génial, soit je suis nul.


    Au niveau des relations:


    ✓ Les relations intimes : les personnes choisies sont souvent perfectionnistes également, ou au moins exigeantes. En couple, le risque est que la personne perfectionniste n’écoute pas les compliments du conjoint, mais remarque le négatif, les petites remarques. A force, le conjoint ne fait plus l’effort car il ne se sent pas entendu.
    ✓ Les relations avec les enfants : ils peuvent être désirés sans faille et penser qu’ils ne seront jamais à la hauteur.
    ✓ Les relations avec les parents : les parents peuvent être idéalisés, demandeurs d’excellence.
    ✓ Les relations sociales : celles-ci ne sont pas nombreuses. Le jeu a un attrait performant et non ludique.

     

                 Anne-France Dinant